Fluoglacial - Tendances Négatives

L'amour est un chien de l'enfer



Le Prince de ce monde tient les fils, le fil de la terreur est rouge et celui du mensonge, noir, le fil de l'amour est doré, mais les trois aboutissent à la main d'où part aussi le fil de l'espérance, du bleu le plus céleste. Ces fils d'ailleurs tendent à s'emmêler et trop de belles âmes un peu simples se laissent attraper à ce jeu réglément perdu d'avance. On a glorifié l'amour dans un but très intéressé, l'on entend bien lequel et le chef nègre le révèle apparemment, qui déclarait: "A chaque chien son os, à chaque homme une femme et c'est la paix dans le village."

Un homme méprisant l'amour nourrit souvent des projets vastes, à moins que ce ne soient des intentions meurtrières, le mariage est une école de servilité, l'homme embarrassé d"une femme et de plusieurs enfants est tout à fait capable de marcher à quatre pattes et de lécher les mains du Prince. L'amour remplace les idées, les objets et les droits, le Prince de ce monde estime fort l'amour et recommandera l'amour à ses victimes: les bêtes qui s'accouplent ne songent pas à se défendre et seront la proie du chasseur, le désir les aveugle avant que le chasseur les tue, la mort suivant l'amour et les ténèbres éternelles, le crépuscule de l'intelligence.

On voulait parler de l'amour et l'on se heurte à la nécessité, l'amour n'en semble que le truchement et qui nous y ramène, l'amour ne nous met au-dessus des lois fondamentales, il nous rengage en la soumission parfaite à l'ordre le plus imparfait. L'amour est un sentiment public, les amoureux ne sont pas seuls, on le leur fait accroire et l'illusion de leur solitude - tout comme celle de leur nudité - repose en l'arsenal du Prince de ce monde, le Prince rit de leur vertige, il tient la femme par l'enfant et l'homme par la femme.


La luxure et la mort, Albert Caraco, 1968.
(Illustration: Niklaus Manuel Deutsch, 1517)

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