Fluoglacial - Tendances Négatives

Clubs & Gangs



1990

" Les choses commencèrent à changer pour le 90° après que DJ Jay Ray ait découvert le hip-hop. Il commença à passer du Rakim, Dr Dre, et autres stars du rap pendant son set. Le hip-hop était tout juste en train de devenir populaire à Berlin, et il n'y avait pas de lieu spécifique où l'on pouvait en écouter. Même si quelques DJs étaient intéressés par les nouveaux rythmes, le fait que c'était un genre Américain orienté gangster attira principalement des groupes de Turcs, heureux d'entendre quelqu'un parler de ce qui les concernait, les préjugés et la colère. Le bouche-à-oreille se propagea rapidement que le 90° jouait cette musique et en quelques semaines la population du club changea complètement. Au lieu de plumes et de maquillage, des jeans baggy, des cheveux gras, et de lourdes chaînes en argent devinrent de rigueur. Des foules de Turcs se tenaient devant la petite entrée, zonant dans la rue et exhibant leurs muscles, menaçant les uns et les autres avec des regards, des insultes et des armes. Il y avait une cinquantaine de gangs différents à Berlin à cette époque, composés de Turcs, Croates, Russes, ou Arabes. La plupart d'entre eux trempaient dans des affaires de drogue et de crime, le plus souvent comme une réponse à leur mal de vivre dans un pays étranger. [...]

Sortir et s'amuser demeurait un problème. Les clubs Turcs étaient inexistants, puisque la consommation d'alcool ou le mélange des sexes était mal vu. La plupart des autres clubs refusaient de faire entrer ces invités, craignant des bagarres et des harcèlements sexuels. [...] Après quelques semaines il était évident que tous les gens dans la file ne seraient pas en mesure d'entrer dans le 90°, et une guerre éclata afin de décider quel gang deviendrait le "protecteur" de notre club, une situation comparable à West Side Story ou Roméo et Juliette - mais sans les amants.

Je travaillais comme caissière pour Bob, et après deux semaines j'avais sept gardes du corps à côté de moi au lieu d'un. L'équipe de videurs était composé d'un ex-flic prenant des anabolisants, de deux chefs de gangs opposés ce qui pouvait nous donner un aperçu de leur mentalité, d'un kick boxeur, de notre manager, d'un frère de l'un des chefs de gangs (qui fut tué pendant les émeutes qui suivirent), et de notre videur d'origine, un philosophe et intellectuel Suisse. Ma tâche consistait à collecter les entrées et toutes les armes. Bientôt j'eus une montagne de couteaux, de fusils, et bagues de combat s'empilant à côté des parapluies et des boas oubliés datant des débuts du club, j'étais devenu une experte en marques d'armes. La situation était cauchemardesque. Nous avions des hooligans alignés devant le club chaque week-end. Les chiens aboyaient et les hommes se battaient, menaçant de tirer, matraquer, ou planter tout le monde. Les femmes et les drag queens disparurent totalement de notre voisinage; toute tentative de les inviter conduisait à l'émeute et les gangs Turcs se précipitaient devant mon bureau.

Plus tard, je fus attaqué dans les toilettes. Six Turcs défoncèrent la porte et tentèrent d'attraper mes seins et la caisse. Johannes explosa une bouteille de champagne dans la foule, saisit la caisse de mes mains glacés, et cria, «Suivez-moi à l'arrière!" Après cet incident, le club ferma ses portes. [...]

Le 90° fut vendu à de nouveaux propriétaires qui profitèrent de la réputation du club pendant des années et continuèrent d'attirer les gosses de riches. C'est maintenant devenu un club VIP qui reçoit fréquemment des stars de la pop internationale et des célébrités de la télé, qui dansent sur de la musique commerciale dans des vêtements de créateur, loin de la foule originale initiatrice du lieu. "





" Things started changing for the 90° after DJ Jay Ray discovered hip-hop. He began featuring Rakim, Dr Dre, and other popular rap stars during his set. Hip-hop was just becoming popular in Berlin, and there was no specific place where one could go hear it. Although quite a few DJs had become interested in the new rhythms, the fact that it was a gangster-oriented, American genre mainly attracted crowds of Turkish gangs, happy to have somebody speaking about issues of prejudice and anger. Word quickly spread that the 90° was playing this music and within weeks the club's crowd completely changed. Instead of feathers and make-up, baggy jeans, greasy hair, and heavy silver chains became de rigueur. Mobs of Turks stood in front of the small entrance, lounging in the street and showing off their muscles, threatening each other with stares, insults, and weapons. There were about fifty different gangs at the time in Berlin, made up of Turks, Croatians, Russians, or Arabs. Most of them dealt with drugs and crime, usually as an outlet for their discomfort and unease with having to live in a foreign country.

Going out and having fun remained a problem. Turkish clubs were nonexistent, since the use of alcohol or mixing among dirrefent genders was frowned upon. Most other clubs refused to entry these guests, fearing fights and sexual harassment. [...] After a couple of weeks it was obvious that not all of the people in line would be able to enter the 90°, and a war resulted to decide which gang would become the "protector" of our club, a situation comparable to West Side Story or Romeo and Juliet - except without the lovers. [...]

I was working as the cashier for Bob, and after two weeks I had seven bodyguards standing next to me instead of one. The bouncers consisted of an ex-cop taking anabolica, two gang leaders of opposing groups that could give us insight into their mentality, a kick boxer, our club manager, the brother of one of the gang leaders (who was killed during the ensuing riots), and our original bouncer, a Swiss philosopher and intellectual. My task was to collect the entrance fee and all weapons. Soon I had a mountain of knives, guns, and knuckle rings piling up next to forgotten umbrellas and boas from former times, and had become an expert on different brands of mace. The situation was a nightmare. We had hooligans lined up in front of the club every weekend. Dogs barked and men fought, threatening to shoot, club, or knife each other to death. Women and drag queens completely disappeared from our vicinity; any attempt to invite them was rushing in and Turkish gangs rushing out right in front of my desk.

Then I was attacked in the bathroom. Six Turks kicked down the door and tried to grab my breasts and the cash box. Johannes exploded a bottle of champagne into the crowd, grabbed the register from my frozen hands, and screamed, "Follow me to the back!" After that the club closed. [...]

The 90° was sold to new owners who lived off of the club's history for years and continued attracting rich kids. It now became a VIP club with international pop and T celebrities visiting frequently, dancing to commercial music in designer clothing, far from the original crowd who had inititiated the scene. "



The beauty of transgression, Danielle de Picciotto, 2011.
(Picture: 90grad, Berlin Kreuzberg)

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