Bal tragique à Saint-Germain-Des-Prés
Par ROD, jeudi 28 janvier 2010 à 18:03 :: FILMS ANCIENS :: #659 :: rss

LES TRICHEURS (1958)
Les 2 films dont je vais parler ici sont un témoignage de la jeunesse de la fin des années 50. Le génie réaliste de Marcel Carné fait face à la Nouvelle Vague naissante. L'existentialisme a infecté la jeunesse qui ne se nourrit désormais que de faux semblants et d'une idéologie de façade, une norme jeune pour éviter la norme de leurs parents. Êtres supposés supérieurs et détachés de toute réalité, ils s'adonnent au même jeu que les Liaisons Dangereuses. Négation de l'amour, refus d'assumer sa propre personnalité, refus de travailler, libertinage... Cette nouvelle philosophie est le terreau du vice. Mais Carné impose un rempart à la déviance, nous sommes déjà idéologiquement dans les années 60 alors que le personnage central, Bob Letellier (Jacques Charrier), représente encore cette figure droite et carrée des 50's. Étudiant de la rive droite, il va pénétrer l'univers de la rive gauche, où tout semble permis.
D'abord moqué pour ses origines bourgeoises, Bob trainait sur les Champs, Alain (Laurent Terzieff) va lui inculquer les rudiments de sa bande, prônant la liberté à tout prix. Mais une fille va s'en mêler, Mic (Pascale Petit). Bob va devoir apprendre le cynisme et l'immoralité pour espérer atteindre le cœur enfoui de cette fille. Au fil du film, on assiste aux changements d'après guerre. C'est bat. L'arrivée du be-bop qui déchaine les pistes de danse, les fêtes-saccage, le jazz, la cinéphilie, le mythe américain personnifié par James Dean, les scooters, la vitesse, toujours la vitesse, synonyme de pouvoir. Au milieu de cette vie à 100 à l'heure, il n'y a plus de place pour l'amour, et Bob va en faire les frais, Alain le bourreau au blouson noir ayant anéanti ses chances. Un violent jeu de la vérité, lors d'une sur'boum chez la riche et fatale Clo (Andréa Parisy), conclura cette aventure moderne, tragiquement. Tricheur !
LE CAFÉ
LA FÊTE

LES DRAGUEURS (1959)
Jean-Pierre Mocky, première ! En 59 déjà, Mocky s'astiquait le chinois sur la drague de rue dans sa première et excellente réalisation. Jacques Charrier (LE TRICHEUR) est un fin limier qui déambule dans Paris en vieille décapotable. Son activité principale : le hameçonnage. Oh c'est pas des choses qui s'apprennent, on a ça dans l'sang ! Il rencontre Joseph (Charles Aznavour) un après-midi sur les quais, qui est un petit employé poisseux qui drague le samedi dans l'espoir de trouver la femme de sa vie. Vaincu d'avance. Mais Freddy le seigneur va le prendre avec lui durant une escapade nocturne dont il se souviendra. Quand on drague on réfléchit pas, on fonce !
Fiancée, amoureuse, libre ? Le ballet nocturne nous entraine de Saint Sulpice à Montmartre en passant par les galeries du Lido lors d'une incroyable séance où tous les coups sont permis. Une seule règle : éviter la facilité. Les femmes sublimes de l'époque s'enchainent. De la rue aux petits troquets jusque dans une réception de bourgeois décadents (LES COUSINS) où Freddy jouera du poing. Tout ça après avoir semé des Suédoises saoules derrière le Sacré Cœur. Mocky le macho, déjà dans un style provocant, brutal et salement drôle, décortique la pratique, dans tous ses recoins, en faisant ressortir avant tout le monde le côté tragique, maladif et solitaire du prédateur. Une leçon !

LES COUSINS (1959)
Le 2ème film de Claude Chabrol est le pendant plus esthétique des TRICHEURS de Carné. C'est aussi la suite du BEAU SERGE dans lequel la situation était inversée. Maintenant, c'est au tour du provincial de monter à la Capitale. Charles (Gérard Blain) rejoint son cousin Paul (Jean-Claude Brialy) à St Germain. Présent pour ses études, être encore honnête et non perverti par la cité, Charles ne veut surtout pas décevoir sa mère, mais les projets de Paul sont tout autres. Fêtard magnifique, Paul est le leader d'une bande de jeunes fauves et de gazelles lubriques. Il va s'évertuer à dévergonder le cousin, naïf, qui va évidemment tomber en amour avec l'une des filles, Florence (Juliette Mayniel). Le quartier latin plongé aux cœurs des orgies orchestrées par un dandy Brialy complètement incroyable, ça vaut définitivement le détour :
C'est le début du culte de la fête sur lequel Antoine Blondin reviendra dans son classique Monsieur Jadis ou L'école du soir. Syndrome d'une génération hédoniste et déculturée décriée par le libraire du coin (Balzac ? Ils ne savent même plus ce que c'est ! Ils ne voient plus que par les polars !). Saint-Germain bidon bidon bidon chantait Lavilliers... Le couple est toujours l'ennemi absolu, le cynisme restant seul maître à bord. Malgré le tragique, il y a beaucoup d'humour, et de dialogues croustillants, contrairement aux futurs films grotesques de ses collègues de la Nouvelle Vague. La fin est un peu trop pompeuse mais ce film reste un superbe état de lieux de ces anciens fils à papa décadents, premiers branchés avant les minets (et les yéyés!), marquant un tournant dans le divertissement. La nuit était leur royaume, que sont-ils tous devenus ?
D'abord moqué pour ses origines bourgeoises, Bob trainait sur les Champs, Alain (Laurent Terzieff) va lui inculquer les rudiments de sa bande, prônant la liberté à tout prix. Mais une fille va s'en mêler, Mic (Pascale Petit). Bob va devoir apprendre le cynisme et l'immoralité pour espérer atteindre le cœur enfoui de cette fille. Au fil du film, on assiste aux changements d'après guerre. C'est bat. L'arrivée du be-bop qui déchaine les pistes de danse, les fêtes-saccage, le jazz, la cinéphilie, le mythe américain personnifié par James Dean, les scooters, la vitesse, toujours la vitesse, synonyme de pouvoir. Au milieu de cette vie à 100 à l'heure, il n'y a plus de place pour l'amour, et Bob va en faire les frais, Alain le bourreau au blouson noir ayant anéanti ses chances. Un violent jeu de la vérité, lors d'une sur'boum chez la riche et fatale Clo (Andréa Parisy), conclura cette aventure moderne, tragiquement. Tricheur !
LE CAFÉ
LA FÊTE

LES DRAGUEURS (1959)
Jean-Pierre Mocky, première ! En 59 déjà, Mocky s'astiquait le chinois sur la drague de rue dans sa première et excellente réalisation. Jacques Charrier (LE TRICHEUR) est un fin limier qui déambule dans Paris en vieille décapotable. Son activité principale : le hameçonnage. Oh c'est pas des choses qui s'apprennent, on a ça dans l'sang ! Il rencontre Joseph (Charles Aznavour) un après-midi sur les quais, qui est un petit employé poisseux qui drague le samedi dans l'espoir de trouver la femme de sa vie. Vaincu d'avance. Mais Freddy le seigneur va le prendre avec lui durant une escapade nocturne dont il se souviendra. Quand on drague on réfléchit pas, on fonce !
Fiancée, amoureuse, libre ? Le ballet nocturne nous entraine de Saint Sulpice à Montmartre en passant par les galeries du Lido lors d'une incroyable séance où tous les coups sont permis. Une seule règle : éviter la facilité. Les femmes sublimes de l'époque s'enchainent. De la rue aux petits troquets jusque dans une réception de bourgeois décadents (LES COUSINS) où Freddy jouera du poing. Tout ça après avoir semé des Suédoises saoules derrière le Sacré Cœur. Mocky le macho, déjà dans un style provocant, brutal et salement drôle, décortique la pratique, dans tous ses recoins, en faisant ressortir avant tout le monde le côté tragique, maladif et solitaire du prédateur. Une leçon !

LES COUSINS (1959)
Le 2ème film de Claude Chabrol est le pendant plus esthétique des TRICHEURS de Carné. C'est aussi la suite du BEAU SERGE dans lequel la situation était inversée. Maintenant, c'est au tour du provincial de monter à la Capitale. Charles (Gérard Blain) rejoint son cousin Paul (Jean-Claude Brialy) à St Germain. Présent pour ses études, être encore honnête et non perverti par la cité, Charles ne veut surtout pas décevoir sa mère, mais les projets de Paul sont tout autres. Fêtard magnifique, Paul est le leader d'une bande de jeunes fauves et de gazelles lubriques. Il va s'évertuer à dévergonder le cousin, naïf, qui va évidemment tomber en amour avec l'une des filles, Florence (Juliette Mayniel). Le quartier latin plongé aux cœurs des orgies orchestrées par un dandy Brialy complètement incroyable, ça vaut définitivement le détour :
C'est le début du culte de la fête sur lequel Antoine Blondin reviendra dans son classique Monsieur Jadis ou L'école du soir. Syndrome d'une génération hédoniste et déculturée décriée par le libraire du coin (Balzac ? Ils ne savent même plus ce que c'est ! Ils ne voient plus que par les polars !). Saint-Germain bidon bidon bidon chantait Lavilliers... Le couple est toujours l'ennemi absolu, le cynisme restant seul maître à bord. Malgré le tragique, il y a beaucoup d'humour, et de dialogues croustillants, contrairement aux futurs films grotesques de ses collègues de la Nouvelle Vague. La fin est un peu trop pompeuse mais ce film reste un superbe état de lieux de ces anciens fils à papa décadents, premiers branchés avant les minets (et les yéyés!), marquant un tournant dans le divertissement. La nuit était leur royaume, que sont-ils tous devenus ?
Commentaires
1. Le vendredi 29 janvier 2010 à 14:45, par F
2. Le samedi 30 janvier 2010 à 23:47, par Pierre Bourdieu
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